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SLD #21 - Gladys Diandoki, content et conversation designer

SLD #21 - Gladys Diandoki, content et conversation designer

Après avoir fait ses armes auprès d’entreprises de la tech américaine comme Google ou Bose et écrit un livre dédié à l’UX writing, Gladys Diandoki apporte aujourd’hui son expertise en content et conversation design en tant qu’indépendante.

Publié le 27 avril 2022

Nous sommes ravis de recevoir dans ce nouvel épisode notre première spécialiste du contenu avec Gladys Diandoki ! Un sujet qui nous tient à cœur et que nous avons pris beaucoup de plaisir à aborder.

De l’écriture de son livre « UX writing, quand le contenu transforme l’expérience » à sa vision du futur du content design en passant par la revendication du statut de designer, voilà les sujets au combien intéressants que vous retrouverez dans cet épisode.

Bonne écoute à tous et à toutes,

Les Designers de l’Agence LunaWeb.

La transcription

Amélie : Bonjour à toutes et à tous et bienvenues dans ce nouvel épisode de Salut les Designers, le podcast de l’Agence LunaWeb ! Ici Amélie et Justine, salut Justine !

Justine : Salut Amélie !

Amélie : Nous avons la chance de recevoir aujourd’hui Gladys Diandoki, autrice du livre « UX Writing, quand le contenu transforme l’expérience » dont vous avez très certainement entendu parler. 

Gladys est actuellement content designer et conversation designer en tant que freelance, notamment chez beta.gouv et Ornikar et elle a également travaillé pour l’entreprise Renault. 

Bonjour Gladys, nous sommes ravis de pouvoir échanger avec toi aujourd’hui et la première question que l’on a envie de te poser c’est : comment vas-tu ?

Gladys : Bonjour Amélie et Justine, ça va très bien. Merci pour l’invitation, c’est toujours agréable de parler de sujets qui sont aussi passionnants.

Amélie : Pour celles et ceux qui ne te connaîtraient pas encore, est-ce que tu peux te présenter ?

Gladys : Pour le faire rapidement, cela fait cinq ans que je fais de l’UX writing mais avant ça, je travaillais dans la tech, j’étais attachée de presse et je manageais aussi des community managers. Donc j’ai travaillé principalement pour des GAFAM, les sociétés high-tech américaines que l’on connaît. Je peux en citer quelques-unes comme Bose, Google, HP, pas mal de structures très différentes.

Amélie : Ok super ! Aujourd’hui, on entend parler d’UX writing, d’UX copywriting, de content strategy, de content design. 

Quel est le terme qui te semble le plus approprié ? À partir de quel moment tu as commencé à en utiliser un plus qu’un autre ?

Gladys : C’est une très bonne question, parce que c’est encore un peu un débat, globalement dans notre industrie, pas seulement en France. De manière générale, j’ai l’impression que le marché va vers le content design parce que ça clarifie un peu ce qu’on fait. Après, je vois un peu des échanges en France avec les copywriters, les rédacteurs web qui ont envie aussi de s’approprier ce terme.

Mais de manière générale, je vois chez Facebook, chez Shopify, chez tous les gros, on est parti sur content design, alors qu’à l’origine il y avait content strategy.

Personnellement, j’ai choisi content design parce qu’effectivement dans les équipes, on nous réduisait souvent aux mots et à l’écriture, alors qu’en fait on va designer et modifier pas mal les écrans, avec évidemment un prisme.

​​De manière générale, le marché va vers l’appellation content design, parce qu’elle clarifie le fait que nous sommes des designers.

En tout cas la direction que tend à prendre notre industrie, c’est de dire que l’UX writing devient juste une compétence, comme la hiérarchie de l’info, comme l’accessibilité, comme l’inclusion, etc. Juste une palette dans notre boîte à outils.

Un autre point que je trouve intéressant, c’est qu’effectivement les rédacteurs web vont dire « oui, mais nous aussi on fait de l’UX writing« . Sauf qu’à la base ce terme avait été utilisé plus pour les designers. C’est pour ça que remettre le terme « Design » dans notre nom permet de clarifier ce qu’on fait, qui on est et pas mélanger les genres.

Parce qu’effectivement, actuellement un rédacteur web pourrait très bien faire des tests comme on les fait, parler à des utilisateurs. Il y en a plein qui le font, ça fait aussi partie de leur métier. Comme ça devient plus qu’un outil en fait, ils peuvent s’en réclamer sans être designer pour autant. Dans ce cas, mettre « designer » permet de clarifier un peu les choses, de mettre des noms signifiants.

On en vient de plus en plus à dire que l’UX writing est une compétence obligée parmi d’autres, comme la hiérarchie de l’information, l’accessibilité, l’inclusion.

L’ancêtre de l’UX writing, c’était tout ce qui était content strategy. Et souvent, les contents stategists n’étaient pas, contrairement à ce que j’ai vu dans la présentation que vous aviez faite, liés au marketing, mais liés au contenu dans l’entreprise, au tout début.

Maintenant, on a des content strategists au niveau des produits mais ce n’est pas forcément marketing. C’est vraiment la vision contenu, la stratégie contenu de la structure. Donc il va y avoir du marketing, il peut y avoir du produit, il peut y avoir d’autres périmètres et donc, comme je le disais, il y a de plus en plus de content strategists.

En tout cas, je parle des marchés un tout petit peu plus matures que nous, qui ont une vision 100% produits, qui vont aider à travailler la vision, faire de l’UX strategy, mais avec leur prisme à eux.

Amélie : Tu fais bien de le préciser, ce sont  des questions que l’on va aborder un peu plus tard. Qu’est-ce que ça représente en termes de métiers, qui à l’intérieur peut s’intégrer, donc super.

Gladys : Mais à partir de quel moment moi j’ai commencé à utiliser ce terme ? En fait, au tout début, je ne savais pas si je voulais être UX designer ou UX writer alors je me suis présentée comme les deux. Parce que je venais de formations d’UX design et que l’UX writing, je découvrais.

Au tout début, je ne savais pas si je voulais être UX designer ou UX writer alors je me suis présenté comme ayant les deux casquettes.

Mais il y a un moment où j’ai pris une décision, je pense que c’était quand j’étais chez Renault. J’ai vu tout le potentiel de travailler l’expérience avec un axe contenu.

Principalement parce qu’il y avait d’autres éléments de l’expérience qui m’intéressaient, comme par exemple le vocal. J’ai fait du chatbot et je vais de plus en plus vers de l’assistant vocal. Ce n’est pas le même métier mais c’est la suite logique si on a l’envie d’aller plus loin dans l’expérience.

Selon moi c’est le futur de l’expérience, on n’aura pas toujours besoin d’interface réelle mais finalement le contenu sera partout, tout le temps. Donc, si on le maîtrise bien, on créera encore de meilleures expériences, qu’elles soient multicanales ou pas.

Justine : Justement, en parlant d’UX writing, tu as écrit un livre « UX writing, quand le contenu transforme l’expérience ». 

Comment t’es venue l’idée d’écrire ce livre ?

Gladys : Je l’ai écrit parce que j’avais lu pas mal de livres au tout début de ma découverte de l’UX writing et j’avais encore plein de questions. J’avais vraiment besoin d’aller explorer mon métier, je pensais qu’il y avait encore plein de choses et j’avais l’impression de n’avoir creusé que la surface.

Et donc, mon éditeur étant quelqu’un avec qui je travaillais déjà avant – quand j’étais attachée de presse, il était journaliste – je l’ai contacté. Je lui ai demandé : « Est-ce que ça vous intéresse ? Je vais travailler là-dessus de toute façon, je vais faire des recherches pour moi et j’aurais de toute façon fait des articles sur Medium ».

Au début de ma découverte de l’UX writing, j’avais beaucoup de questions, j’avais besoin d’aller explorer mon métier. Expliquer mes apprentissages, ça a été ma manière de fixer l’information.

Parce qu’expliquer c’est ma manière de fixer l’information, donc dans tous les cas, j’aurais fait des choses. J’ai eu la chance qu’ils me disent oui, ça m’a permis de me concentrer et d’avoir un but à atteindre, celui de partager par écrit un maximum d’informations sur mon métier.

Justine : Tu commences justement ton livre en spécifiant, avec des chiffres concrets, à quel point le contenu aujourd’hui a un rôle central dans l’expérience utilisateur. Mais tu témoignes aussi qu’il est toujours moins considéré pendant la phase de conception, ce qui est bien dommage.

Qu’est-ce que tu dirais à une marque ou une entreprise qui n’est pas encore convaincue par l’intérêt de UX writing aujourd’hui ?

Gladys : Pour répondre par une anecdote, le choix du titre du livre a bougé. J’étais parti sur « Designer avec les mots » et je suis arrivé à « Quand le contenu transforme l’expérience » parce qu’il y a vraiment cette notion de transformation de l’expérience à intégrer.

Je pense que la recherche utilisateur a été extrêmement importante dans le design. Parce qu’à partir de là, on avait des données qualifiées, on connaissait mieux nos utilisatrices, nos utilisateurs et en fait, ça a commencé à transformer l’expérience.

La recherche utilisateur, avec tout ce qu’elle a apporté de données quantifiées, a été extrêmement importante pour le design.

Chez les designers – en tout cas si je prends le cas de ceux que je connais –  il y a plein de profils différents. Et pas mal de gens ne viennent pas du contenu, ne savent pas forcément raconter les choses ou vont peut-être réutiliser le jargon de leur employeur, etc.

Raconter des histoires, c’est un métier que des gens maîtrisent. Et c’est vrai que ça a du sens, si on veut passer au niveau d’après, si on veut résoudre les problèmes qu’il a souvent dans la clarté des informations, sur le fond, la pertinence des arguments qu’on va mettre en avant. Ça, c’est des choses que l’on sait faire en tant qu’UX writer.

Que l’on vienne d’un background comme moi de communicante, ou de journaliste ou de rédacteurs web, on fait tout le temps de la recherche en fait.

Raconter des histoires, c’est un métier. Si l’on veut résoudre les problèmes que posent souvent la complexité des informations, le fond, optimiser la pertinence des arguments que l’on souhaite mettre en avant, il faut faire appel à des UX writers.

Pour vous raconter une bonne histoire ou pour vous toucher avec des mots, il faut que l’on ait fait ce travail de fond qui est d’aller explorer notre sujet. Le comprendre tellement et de le sentir tellement en fait, qu’on va pouvoir le remettre sur l’écran.

C’est des compétences que d’autres personnes peuvent avoir – il y a des UX designers qui doivent certainement les avoir – mais ça, c’est notre axe en fait. Donc, si vous avez envie de passer à l’étape d’après, je pense que ça change tout d’avoir quelqu’un dont le regard, c’est ça.

Justine : Et de manière plus générale, pour quelqu’un qui voudrait insuffler l’UX writing ou le content design dans son entreprise, quel conseil lui donnerais-tu ?

Gladys : Quelqu’un qui ne le fait pas encore ou quelqu’un qui le fait ? Parce que ça change tout (rires)

Amélie : (rires) Quelqu’un qui ne le ferait pas encore.

Gladys : Je trouve qu’on a la chance d’avoir une communauté et des personnes comme Camille Promerat, comme Sophie Ianiro. Nous sommes plusieurs à avoir un peu investi ce champ de la démocratisation de notre pratique, à avoir créé beaucoup de contenus pour que les gens comprennent mieux ce qu’on fait et puissent aussi partager.

Si vous souhaitez vous lancer dans l’UX writing, regardez déjà les contenus qui existent, qui sont disponibles. Essayez de vous y acclimater, de les comprendre et de les partager avec vos équipes.

Donc je pense que la première chose, peut-être, c’est de partager ce qui existe. Les cas comme les vôtres aussi, parce que c’est intéressant de voir du concret. Le problème, c’est qu’on est souvent trop dans la théorie et pas assez dans la pratique. Je pense qu’on a besoin de montrer de plus en plus de cas concrets.

Pour quelqu’un qui débute, informez-vous, c’est la première chose. Regardez ce qui existe, ce qui est disponible, essayez de vous acclimater, en tout cas de comprendre et de partager avec vos équipes et essayez de mettre en pratique des choses.

Si vous en avez l’envie, c’est peut-être le moment d’essayer de développer cette compétence sur un projet, de montrer comment ça marche à votre équipe et de faire du test and learn.

Après, c’est difficile quand on a déjà plein d’autres casquettes de rajouter ça en plus. Mais peut-être que quelqu’un en freelance peut venir vous supporter sur un projet ? Ou quelqu’un qui aurait une appétence dans l’équipe pour ça ?

Je pense qu’il y a plein de manières en tout cas de le faire. Peut-être que c’est le moment d’essayer de développer un peu ça sur un projet, de montrer comment ça marche et de faire vraiment du test and learn.

Même nous, quand on a débuté, on ne savait pas tout. Les gens ont la chance qu’il y ait de plus en plus de ressources, de plus en plus de choses pour montrer des cas, donner des exemples, expliquer des techniques, même si j’ai encore plein de choses à raconter.

Amélie : Oui, ça peut commencer par des temps de formation pour juste sensibiliser sur le sujet. 

Il peut aussi y avoir peut-être une notion de référent dans chacun des services, pour qu’il y ait quelqu’un avec cette casquette-là par la suite ?

Gladys : C’est ça. Après il faut faire attention, car je vois de plus en plus un problème qui arrive et qui est une problématique entre le design et le marketing. Parce qu’évidemment vous allez avoir des gens au marketing qui savent écrire. Sauf qu’écrire pour vendre, ce n’est pas écrire pour de l’expérience.

Parfois, entre marketing et UX writing, on se rend compte que ça ne fonctionne pas, que ce n’est pas le même travail. Toutes les personnes qui savent rédiger ne savent pas forcément le faire pour l’expérience.

Je vois des gens qui viennent frapper à ma porte en me disant « on a telle problématique parce que c’est le marketing qui valide tous les textes » mais on se rend compte que ça ne fonctionne parce qu’en fait, ce n’est pas le même travail. Tous les gens qui savent rédiger ne savent pas le faire pour l’expérience. Ils peuvent l’apprendre, mais ce sont des métiers très différents. Donc vraiment, même si c’est quelqu’un du marketing, aidez-le.

Moi je fais de la formation pour expliquer la différence entre le marketing et ce qu’on fait, parce que notre métier est nouveau, on ne peut pas demander à toute l’industrie et tous les gens qui y travaillent de savoir ce que l’on fait.

Donc, il y a beaucoup d’éducation à tous les niveaux.

Justine : Comment est-ce que tu interviens dans le déroulement d’un projet ? 

Par rapport aux autres métiers notamment. Est-ce que tu peux nous donner des exemples d’ateliers que tu mets en place pour travailler le sujet ?

Gladys : J’interviens exactement au même moment que le designer, c’est-à-dire dès le brief.

On va poser plein de questions, sachant que ce qui va nous différencier avec l’UX designer ou le product designer, ça va être la manière dont on regarde l’expérience et les éléments qu’on va peut-être aller chercher.

Je sais que je vais beaucoup à la pêche à l’information et je vais voir qui sont mes homologues du côté du légal, par exemple. Pour m’assurer dès le début que je sache exactement ce qui va être un enjeu côté légal, que je puisse le prendre en compte et éventuellement le devancer.

Parce que j’ai beaucoup vu de projets où l’on fait tout le parcours et puis à la fin, le légal arrive et va vous dire « vous mettez ce bloc de texte là » et ça casse tout ce qui avait été créé, ça ne marche plus. D

onc le truc, c’est que plus on va devancer les choses, plus ça simplifie la conception et plus on peut aussi co-concevoir des bouts avec eux.

Sur un projet, je commence en même temps que le designer. Je vais à la pêche aux informations, je vais voir par exemple qui sont mes homologues du côté du légal pour devancer leurs besoins.

Donc moi, je vais souvent aller à la pêche à l’info, poser des questions, aller voir côté business, reprendre le brief, comprendre le produit. Je fais des écrans, mais surtout, j’ai besoin de tout comprendre. Et si je comprends bien ce qui se cache derrière, je sais ce que je mets devant sur l’écran final.

On peut aussi aller travailler avec le marketing ou les product marketing managers – ça dépend comme on les appelle dans les entreprises – pour essayer de comprendre comment cette équipe souhaite mettre en avant le produit. Et donc toutes les informations qu’on va pouvoir glaner vont nous aider à commencer à construire et à définir ou l’on va mettre telle information, comment et pourquoi je vais la structurer de telle façon. Donc on a notre phase de prise de brief puis une phase de recherche secondaire.

La recherche secondaire, ça va être très très très utile avant de faire de la recherche primaire, donc avant d’aller parler à des utilisateurs ou utilisatrices. Aller voir les différents métiers, commencer à poser des hypothèses et se dire qu’il faudrait qu’on aille explorer ça. Quels sont les termes qu’on utilise peut-être déjà en regardant le lexique qui existe.

Il m’est déjà arrivé d’aller taper à la porte des équipes content ou l’on a plus de rédacteurs web pour dire « je n’ai jamais parlé de ce sujet, qu’est ce que vous dites ? Comment vous le dites ?” Et donc on va aller glaner un peu partout des infos avant de parler aux utilisateurs ou utilisatrices et avant ensuite de commencer à faire de l’idéation.

Ce qui change, même si cela dépend des designers, c’est que de manière générale nous allons plutôt faire du « content first ».

Et un truc qui change – enfin ça dépend des designers – c’est que de manière générale on va plutôt faire du « content first » avant de faire des écrans. On va travailler vraiment le fond, la hiérarchie de l’information, comment on la structure, pourquoi on dit ça.

Donc il y a plein d’exercice très divers, ça peut être de la conversation, du jeu de rôle, chez Blablacar ils avaient fait comme un échange de SMS pour commencer à poser les choses, parfois, on se pose juste sur le contenu et on travaille la hiérarchie d’info, parfois on va faire du tri de carte. Il y a plein, plein, plein de méthodes, et c’est ça qui est cool. Chaque personne va pouvoir trouver la ou les méthodes qui lui conviennent. Et puis on commence à poser les choses sur les écrans, à force d’itérations, avant de pouvoir faire des évaluations et ensuite de voir si on réitère ou pas.

Pour impliquer les autres métiers, il y a aujourd’hui plein de méthodes, c’est ça qui est cool. Chacun.e va pouvoir trouver la ou les méthodes qui lui convient.

Et un sujet dont j’ai parlé et dont on ne parle pas souvent, c’est la localisation. Il y a plein de métiers impactés, mais la localisation est très importante parce que les gens qui vont localiser nos écrans, en fait, c’est la suite logique.

Donc si on n’a pas travaillé ensemble, si on ne s’est pas aligné sur un certain nombre de choses, si on ne leur a pas montré en avance, c’est compliqué. Souvent le problème – et je sais que j’ai eu une ou deux fois le cas dans des projets – c’est qu’on va leur demander de travailler à l’aveugle, on va leur dire « localises moi ça » mais en fait les équipes n’ont pas forcément les écrans sous les yeux. Et on se retrouve avec des fois des traductions avec trois petits points, il n’y a pas la fin de la phrase. Ça, ça arrive. Même dans des Instagram and co, il m’arrive de voir ça.

La localisation est très importante. Parce que les professionnel.le.s qui vont localiser nos écrans représentent la suite logique de notre travail.

Donc oui, il y a plein de choses à leur donner pour que ces équipes puissent bien travailler. Et puis il y a plein de points que l’on peut faire ensemble. Dans les structures un peu plus matures, parfois ces équipes vont travailler aussi dans Figma, par rapport aux maquettes qu’on a pu concevoir, pour localiser. C’est super intéressant et puis ça bouge donc c’est cool.

Justine : Tu parlais d’atelier d’idéation, est-ce que tu en as un fétiche en tête, que tu aimes bien faire, qui marche à tous les coups ?

Gladys : Moi, j’aime bien les ateliers, j’en fais tout le temps et j’arrive à en inventer plein. Donc je n’ai pas d’atelier fétiche.

Après, c’est vrai que ça dépend vraiment du problème. Je me rappelle un projet ou j’avais le côté business qui voulait que je fasse un email et un SMS à chaque étape de la commande et du suivi de commandes. C’était « Tu vas nous envoyer un email partout, tu vas nous envoyer un SMS à chaque étape ». J’ai commencé à réfléchir après avoir fait ma recherche, à regarder un peu ce qui me semblait pertinent, là où j’avais de la matière, mais je n’en avais pas.

J’aime les ateliers, j’en fais tout le temps et j’arrive souvent à en inventer de nouveaux.

Alors j’ai fait une espèce de mapping de toute cette phase de l’expérience et de tous les messages que j’étais censé envoyer, en expliquant les messages que je considérais pertinents et les messages qui ne me semblaient pas pertinents – j’avais mis une croix dessus – et on a fait un atelier là-dessus.

Au début c’était « Oui, on doit leur envoyer des messages tout le temps« . Et ce qui a été intéressant, c’est que j’ai dit « très bien, voilà mes suggestions de messages sur ce mapping, est-ce que vous pouvez me dire à ce à quoi vous avez déjà pensé ?« .

Et là, tout d’un coup, c’était « alors là, on peut avoir ce message » donc ok, il y avait des points qui étaient intéressants et j’ai pu aller récupérer des données – d’ailleurs, cet e-mail n’est finalement pas sorti, mais il pouvait être très intéressant – et puis il y a plein de messages ou c’était « ok, c’est vrai, ça ne sert à rien« .

Et il y avait un message ou j’avais dit « Je pense que ça peut être intéressant d’aller voir l’équipe CRM » parce qu’il y avait déjà un Welcome Package, donc pourquoi envoyer un message alors que les gens vont déjà recevoir un message ? Est-ce qu’il y a de l’optimisation possible avec cette équipe et les messages qui seront envoyés ? Et donc c’est ce qui a été fait. Et finalement j’ai juste eu à faire un encart et pas un email additionnel. Ça , c’est un exemple qui aide beaucoup.

Je me rappelle un projet ou le côté business voulait que je fasse un email ET un SMS à chaque étape de la commande et du suivi de commandes. On a donc fait ensemble un mapping des messages.

Donc ça, c’était une toute petite « Content Journey », ce n’était pas un truc de fou avec toute l’expérience, mais c’était déjà suffisamment impactant et ce mapping est devenu un vrai outil de travail pour l’équipe. On savait exactement ce qui devait partir, quels étaient les triggers dans le tableau, c’était hyper intéressant.

Je peux vous donner un deuxième exemple qui est très simple. Je faisais des guidelines sur un projet et l’équipe, les autres designers ne les lisaient pas du tout. Parce qu’effectivement, dire de la doc ça n’intéresse pas tout le monde. Le problème, c’est que comme j’étais la seule UX Writer dans l’équipe, si personne ne lit ce qui est fait, comme je n’étais pas sur tous les projets, ça veut dire qu’en fait il n’y a absolument pas de cohérence, dans l’ensemble de l’expérience, on utilisait un mot plutôt que tel autre.

Donc, j’ai fait un atelier pour vraiment pour aligner la vision de tout le monde. J’avais fait une colonne verte, une orange et une rouge, et je n’avais pas invité que mon équipe, mais aussi des équipes qui étaient pertinentes sur l’aspect que je souhaitais étudier, et j’avais mis plein d’écrans. Et j’ai dit « OK, vous allez noter tous les termes ».

Parce que les guidelines que je réalisais sur un projet n’étaient pas lu du tout par les designers, la solution a été de faire un atelier pour aligner la vision de chacun.

Donc au début, à côté des écrans que j’avais rajoutés sur mon board, tout le monde avait mis des termes et ensuite on les a placés sur le board en disant « ça, on arrête de l’utiliser », donc dans la colonne rouge on avait plein plein plein de termes dont on savait qu’on ne les utiliserait plus dans le produit. Du jargon, plein de termes un peu compliqués.

Après, il y a eu tous les termes ou on était sur plein d’éléments comme la marque, les sous marques, plein de trucs. Des termes dont on était sûr qu’on allait devoir les utiliser ou qu’on allait les utiliser, donc on les a mis en vert, plus des termes qui étaient déjà validés.

Et puis en orange, c’était tous ceux ou la recherche était nécessaire pour aller plus loin. Donc on s’est retrouvé avec un backlog de choses à aller chercher assez immense. Mais c’était bien parce que ça permettait à tout le monde de dire « ok ça on n’utilise plus, ça on sait qu’on utilise et ça on va aller chercher, on n’est pas sûr« .

Sur le paiement par exemple, il y avait « carte de crédit ». J’ai dit « non, carte de crédit, quand on voyage un peu, aux Etats-Unis, la carte de crédit, c’est pour faire un crédit. On parle de carte bancaire, de carte de paiement« . Et j’avais suggéré « on peut mettre « carte de paiement » mais on peut aussi dire « mode de paiement », ce qui pourrait inclure de futurs paiements« . Après ce sont des choix à faire valider. J’espère que c’était clair pour eux, mais c’était plein d’hypothèses à aller valider qui sont juste liées au mot. Mais je pense que c’est un exercice simple que plein de gens peuvent faire et que je n’ai pas documenté.

Amélie : Oui, pour prioriser, c’est super intéressant en effet.

Gladys : Pour prioriser, faire un lexique. J’avais fait un lexique et j’avais mis tous les termes qu’on utilisait, tous les termes qu’on ne devait plus utiliser et tous les termes qui remplaçaient ces termes-là.

Amélie : Aaaah, ok.

Gladys : Donc voilà, il y a plein de manières de faire, moi j’aime bien créer des ateliers, je le fais vraiment en fonction du problème que je rencontre mais…

Amélie : Tu t’adaptes.

Gladys : Oui, il y a des choses qui peuvent revenir, mais j’adapte aussi.

Amélie : OK, c’est super concret en tout cas, ça donne un super exemple, je trouve. En tout cas nous ça nous parle ! (rires)

Gladys : (rires) Si ça vous parle, au moins c’est bien.

Justine : Donc on parlait de toute la phase de conception, est-ce que tu peux nous dire à quel moment tu as commencé à inclure des utilisateurs ? Et peut être nous raconter une expérience qui t’a marqué, ou ta première expérience ?

Gladys : Je les ai intégrés dès le début parce que comme ma formation, c’était l’UX design quand j’ai choisi de faire une transition après la communication, pour moi, c’était une évidence. Quand j’ai découvert le UX writing, c’était marqué UX, donc c’était une évidence que les utilisateurs étaient dans le processus, que ce soit au niveau de la recherche ou au niveau des tests. Pour moi, il n’y a pas eu de débat. Je n’ai pas eu à découvrir ça parce que c’était acquis.

Donc à partir de quand ? Dès le début de ma formation. Mais après ça, on se rend compte dans le quotidien qu’il y a plein de structures qui ne sont pas du tout matures. Sur l’UX tout court, il n’y a pas de recherche ou très peu, on est là pour faire des maquettes, etc.

J’ai toujours cherché à tester mes textes et même si ça reste un combat, j’intègre les utilisateur.rice.s dès le début du projet.

Donc je sais que ça a toujours été un combat, que ce soit faire juste du data mining (NDR : de la recherche de donnée utilisateur en ligne, sur les réseaux sociaux, les forums, etc), ce qui est déjà assez dingue et ce qui permet déjà de transformer une vraie expérience clairement, en tout cas d’avoir un niveau de connaissance utilisateur et donc une pertinence déjà beaucoup plus grande, même si ce n’est pas parfait, mais c’est déjà super.

Je pourrais vous donner des exemples si vous voulez, mais en tout cas j’ai toujours cherché à avoir des utilisateurs et et j’ai fait du lobbying pour qu’on puisse tester. Je suis allé dans les boutiques, dans les centres commerciaux, pour faire des tests, etc. Même si c’était du guérilla UX, j’essayais de faire les choses correctement, j’allais toujours chercher des utilisateurs. Le plus possible, j’essaie de les intégrer.

Aussi parce que, quand on fait notre métier, les gens réalisent qu’on a besoin de recherche parce que c’est ce qui va changer complètement ce qu’on va rédiger. Et on a besoin de tester parce que c’est ce qui va effectivement valider ou pas le fait que si ce n’est pas clair, c’est problématique. Pour moi, évidemment. Si ce n’est pas clair, si les personnes ne comprennent pas, si elles froncent le regard quand elles voient mon écran parce qu’elles n’ont pas envie de le lire ou si elles me disent « ouais, c’est du blabla » c’est qu’on a un truc à corriger.

Si vous voulez des exemples, je me rappelle justement sur un projet, j’arrive et on me dit « oui, en fait ça fait des mois qu’on travaille sur une copie pour faire la transition entre le produit qu’on a aujourd’hui et la future app qu’on veut, est-ce que tu peux travailler sur ça ? ». En deux jours, évidemment (rires). Il y a eu des mois pour une pop-in quand même. Je me rends compte en regardant l’écran qui a été créé qu’ils ont fait des pavés, des pavés et des pavés.

Alors moi, je coupe tout, je revois complètement le truc. Et puis après, je commence à avoir des product owners qui viennent me dire « oui, mais tu n’as pas mis ça, tu n’as pas mis ça, tu n’as pas mis ça, tu n’as pas mis ça ». Non, là, il y a une action principale qu’on leur demande, mais je peux mettre du bénéfice. Et d’ailleurs j’ai demandé, est-ce qu’il y a du bénéfice ou pas ? Parce que ce sont des arguments, si ça a été prévu avant, que ce soit un mini rebranding, un refresh de quelque chose, ce sont toujours des choses en plus qui donnent envie en fait, si cela a été planifié.

Je vais là où sont les utilisateur.rice.s, centre commerciaux, boutiques. Tous leurs retours me permettent d’acter avec l’équipe projet et de stopper des discussions peu constructives.

Mais en fait ce qui s’est passé, c’est que moi j’ai dit clairement « pour moi ce n’est pas X, Y, Z qui vont changer les usages« . Ce sont les utilisatrices, les utilisateurs qui ont raison et c’est ce qui m’a forcé donc à aller les voir. Je suis allé dans des centres commerciaux faire des tests et j’ai fait une itération. Je me suis rendu compte qu’il y avait encore des trucs qui n’allaient pas alors même que j’avais clairement revu. J’ai fait une deuxième itération, j’ai retester dans une boutique et en fait on était bons sur la deuxième, les choses étaient claires, il n’y avait plus de gens qui regardaient étrangement l’écran, qui disait « Je ne l’ai pas lu ou peu importe ou j’ai lu en diagonale« .

Et en fait, pour que ça passe, il a fallu que j’ai des itérations, que je mette des verbatims. C’est ce qui a permis de valider et d’arrêter toutes formes de discussions. Parce que ce n’était pas mon avis, ce n’étaient pas leurs avis. Et clairement, quand les gens vous disent « non mais je n’ai pas lu » l’argument qui était de « oui, mais rajoute telle information« , il ne marchait pas.

Alors même que ma version devait encore être réduite par rapport à ce qui avait été fait avant. Mais voilà, c’est plein plein de choses comme ça. Donc pour moi, la recherche, c’est notre meilleure alliée. La recherche et les tests. Ça change tout, sans ça, mes contenus peuvent être très moyens.

Amélie : Tu l’expliques dans ton livre, on ne lit pas sur du papier comme sur un écran. On va plutôt scanner notre page avec une lecture qui est complètement aléatoire. 

C’est hyper intéressant de comprendre un peu comment est-ce que le cerveau fait pour assimiler tout le contenu qui est présenté à lui. 

C’est des choses que l’on peut un peu oublier en tout cas.

Gladys : C’est pour ça que j’ai voulu commencer par ça. Parce qu’à chaque fois, les gens ne comprennent pas comment on lit, les gens ne comprennent pas qu’en fait il y a des stratégies que l’on va utiliser et qu’on peut naviguer dans le contenu. Parce que c’est vraiment ça qu’on fait, on va naviguer dans les pages, mais on va aussi naviguer dans le contenu.

Et c’est pour ça que l’on est aussi designers aussi. On va faire des choix et on va décider quelle information est pertinente et dans quel sens on va la donner. C’est pour ça que je dis, ce n’est pas que les mots. Bien-sûr, il y a beaucoup de mots, mais plein de fois, je vais suggérer, je vais dire « voilà, je ne vais pas rajouter du texte, du texte et du texte. Faisons un schéma« .

Amélie : Oui, c’est aussi travailler la mise en forme.

Gladys : Oui ! Après, on peut ne pas valider cette idée. Ça peut être une piste ou une hypothèse. Mais on n’est pas limités à juste un mot que l’on change. On va réfléchir un tout petit peu plus. Est-ce qu’un tableau est plus pertinent pour passer l’information? Est-ce que l’information est plus facile à lire comme ça ? Est-ce plus compréhensible et plus digeste ? Moi, je vais aller vers ça.

Amélie : Ok, donc c’est le fond et la forme, on est complètement là-dedans.

Gladys : Le fond et la forme, et c’est pour ça qu’on est aussi en binôme. C’est que sur la forme, il y a des gens qui sont encore meilleurs que nous et c’est pour ça qu’on travaille ensemble. C’est parce qu’on va allier nos forces pour essayer de créer la meilleure expérience. Ce n’est pas juste le contenu et ce n’est pas juste la forme, c’est le fond et la forme.

Justine : Justement, dans ce processus itératif, comment est-ce que tu fais pour tester le contenu, l’UX writing, tout ce que tu auras mis en place ?

Est-ce que tu peux nous donner un exemple de format que tu aimes bien utiliser ?

Gladys : Une des choses les plus facile pour vulgariser, c’est le test que vous avez fait, celui des surligneurs, dans la vidéo que vous avez partagé. Sincèrement là vous avez eut de la chance, vous avez eu plein de vert (rires) mais il y a des moments, il y a du rouge parce que des choses ne sont pas claires.

Et c’est hyper intéressant aussi de laisser les gens s’exprimer sur ce qui n’est pas clair, ce que ces personnes ne comprennent pas, ce qu’elles n’apprécient pas, ce qui va être extrêmement frustrant. Là, on leur demande un temps de concentration, donc c’est un tout petit peu biaisé, mais les tests d’utilisabilité classiques, c’est aussi le meilleur allié pour tout le monde, pour toute l’équipe, parce qu’on va regarder. Et c’est vrai que moi, je vais me poser sur des éléments qui ne seront clairement pas les mêmes que mes collègues du design.

J’aime beaucoup observer la réaction physique des gens aux contenus que j’ai produits. Le langage corporel peut dire beaucoup en test utilisateur.

Mais c’est pour ça qu’on est là, c’est parce qu’on est complémentaires, donc c’est pour ça que c’est intéressant. Comme je disais, quelqu’un qui fronce les sourcils, quelqu’un qui va peut être passé très vite, la manière dont il va regarder va dire beaucoup aussi. Quelqu’un qui va peut-être fixer, il y a plein de manières de voir la réaction, le langage corporel dit beaucoup.

Amélie : L’aisance de lecture aussi que tu essayes de capter ?

Gladys : Oui, il y a plein de choses, les termes qui vont être employés… Tout en fait. Et c’est ce qui est bien. Après j’aime bien aussi tester les émotions, la frustration. Je pense qu’il y a un très gros biais, c’est de me sortir la maquette, le prototype qui fonctionne. Moi, j’aime bien aller tester les écrans qui ne fonctionnent pas (rires).

Voir si mes messages d’erreurs sont pertinents. Si on sait que ça ne marche pas, allons-y justement. Ne vous dites pas « je ne veux pas le faire parce que je sais qu’il y a un problème« . C’est précisément parce qu’il y a un problème, allons régler le problème.

Et donc les émotions, les frustrations. Est-ce qu’on est motivant en onboarding par exemple ? C’est hyper intéressant, c’est important. Et donc on peut aussi se dire on va faire un travail que sur ça, sur les éléments de design émotionnel. Est-ce qu’ils sont à propos ou pas ? Est-ce qu’on a utilisé le bon ton à ce moment-là ? Etc.

J’aime bien tester les émotions, la frustration. Confronter aussi les utilistateur.rice.s aux écrans qui ne fonctionnent pas.

Ensuite les tests, franchement il y en a plein. Le test de cinq secondes, ça permet de savoir si le message est clair. En onboarding, ça permet de savoir si les messages clés que vous vouliez passer sont suffisamment clairs. Et puis après, vous pouvez vous dire « Mais est-ce que ces éléments, précisément, vous motiveraient à aller plus loin ?« .

Il y a vraiment plein de choses. Je sais qu’il y a des personnes qui travaillent sur les tests, qui sont en train de regarder comment notre industrie à nous, notre hyper spécialisation, travaille, des tests que X, Y, Z ont mis en place, pour essayer de regrouper plein de méthodes qu’on ne connait pas, puisqu’on les invente tous aujourd’hui.

Tout ce que l’on fait assez neuf, même si on peut réexploiter des choses qui existent déjà et que les UX researchers, les UX designers ont déjà mis en place et heureusement, on a que des points communs. Après, en fonction de ce qu’on va aller chercher, on va aller chercher dans nos différences.

Ça me fait penser juste à un dernier test par exemple. Je l’ai mis dans le livre, c’est le texte à trou. Il m’est arrivé de chercher un terme et de galérer. Il m’est arrivé de mettre la phrase et un trou et de demander à la personne de remplir ou de donner une définition et de demander à quelqu’un « quel serait le terme le plus approprié ?« . Il y a plein de méthodes, en tout cas pour du contenu pur. Mais on utilisera les mêmes méthodes que le design avec ces choses en plus, en fonction de nos besoins spécifiques.

Justine : C’est vrai que les méthodes se rejoignent bien.

Gladys : Oui.

Justine : On était très centré sur les utilisateurs jusqu’ici, mais on avait aussi une question à propos du SEO (NDR : le référencement naturel). Aujourd’hui il a beaucoup d’importance, parfois les clients ne veulent pas trop « lâcher l’affaire », même si on leur démontre par A+B que ce n’est une bonne chose pour le texte d’être centré à 100% sur le référencement.

Comment est-ce qu’on fait pour trouver le bon compromis entre le SEO, les utilisateurs et la vision des décisionnaires ?

Gladys : Pour l’instant, la seule méthode que j’ai trouvée, c’est la collaboration.

Quand on est dans des tunnels de commande, le SEO est quasi inutile, il va l’être sur certaines pages, sur certains éléments, sur certains parcours. Si je suis dans une app, il n’a aucun impact, donc voilà. Le SEO a très peu d’impact, de manière générale, sur nous, sauf si effectivement je suis sur des pages qui sont référencées par Google.

Ensuite, je parlais tout à l’heure de la recherche, elle va être extrêmement importante. Pour le SEO, si les gens sont assez intelligents pour comprendre que si on a fait de la recherche, on a parlé aux utilisateurs, que de manière générale, il y a un terme qui revient, mais que ce n’est pas le terme idéal pour le SEO, on peut aussi travailler en bonne intelligence. Se dire « Ok, ça, c’est ce qu’on trouve nous en UX research, quel est le terme le plus approprié pour vous en SEO ?« .

Le SEO fait partie intégrante de ma recherche utilisateur secondaire. Quels termes sont employés, quels sont ceux que l’on va garder, changer.

Je sais qu’on m’avait aussi déjà dit « Ce n’est pas grave, si on ne peut pas utiliser tel terme, on va le mettre en backend« . Il y a d’autres manières de travailler avec le SEO. S’il doit être en front, peut-être qu’à un moment donné, on mettra un synonyme, il y a des manières de travailler pour que ça fonctionne.

Personnellement, je n’ai travaillé que dans une structure avec le SEO, le reste du temps, je n’avais pas affaire à eux. Comme je le disais, j’étais souvent dans des tunnels de commande, dans des choses ou le SEO n’était pas du tout approprié.

Mais le SEO, il va être important pendant ma recherche secondaire. Ça va être important d’aller voir les termes qui sont employés. Peut-être que les termes sont là, peut-être qu’ils ne sont pas là. Ça va être une des sources que j’utilise pour poser des hypothèses qu’on va ensuite aller vérifier en recherche. Si ça marche, il n’y a pas vraiment de débat. Si ça ne marche pas, discutons comme on va discuter avec la localisation, comme j’ai discuté avec les PMM, le marketing et puis après, on voit comment on arrive à s’aligner ou non.

Amélie : Mais comment est-ce que tu fais pour désiloter, pour que tout le monde collabore ensemble et puisse s’exprimer sur son expertise, son métier, ses contraintes ?

Gladys : Ce qui est intéressant et important, et très différent de l’UX design, c’est que le contenu, c’est l’expérience. Parce que le contenu, vous allez le trouver partout. Vous allez le trouver dans un point de vente, vous aller le trouver quand la personne arrive sur le site, quand elle décide de créer son compte, dans les emails qu’on lui envoie, que ce soient ceux que l’UX writer va lui envoyer, qui sont liés au produit ou ceux que le CRM ou le marketing peuvent lui envoyer, qui sont liés plus à de la vente ou à la proposition de nouvelles features, ou la localisation, tout à l’heure j’en parlais aussi.

En fait, les gens du contenu, c’est plein plein, plein, plein, plein de métiers. Donc oui, on va devoir travailler ensemble. Que ce soit pour nous aligner sur des éléments, sur la voix. Pas forcément le ton parce que c’est très différent ce qu’on va faire versus ce que les autres équipes vont faire, mais en tout cas sur la voix.

Il faut désiloter au maximum, parce que le contenu est partout. Dans un point de vente, sur le site internet, dans les échanges d’e-mail que vous allez entretenir avec un.e client.e. Ce sont beaucoup de métier qui sont impactés et qui travaillent le contenu.

À quoi ressemble la marque ? Mais aussi comment chaque canal va l’appliquer ? Parce que ça ne fonctionne pas pour tout le monde, donc comment on fait ? On est obligé de travailler ensemble parce que le contenu veut qu’on soit très proche du design de service. C’est du design de service concrètement. Et je pense qu’on applique clairement les mêmes méthodes que le design de service.

Sur un de mes projets, je travaillais sur une app avec un autre service avec lequel j’étais censé être en lien. On a fait des ateliers, on s’est aligné sur les termes employés dans les deux services, sur les différents éléments de l’expérience. Et des fois, on n’était pas d’accord donc on allait tester et des fois, on n’était pas d’accord donc on n’allait pas utiliser les mêmes termes. Mais a minima, on engageait la discussion et on arrivait quand même à s’aligner sur l’essentiel. Ce qui est quand même hyper important.

Le design de service a déjà toutes les clés, clairement moi j’en utilise plein. Tout est là déjà, mais il faut communiquer, il faut désiloter à fond.

Justine : Une jolie conclusion.

Une dernière question pour aller un peu plus loin, quelle est ta vision sur l’évolution de l’UX writing,  du content design ?

Gladys : Je pense que, pour la France en tout cas, le grand danger, c’est de continuer d’avoir des équipes d’une personne, parce que ça ne tient pas. Parce qu’en fait, on doit évoluer de la même manière que les product designer ou les UX designers. C’est-à-dire, si vous avez quinze personnes et un UX writer, ça ne marche pas.

C’est intéressant de voir comment certaines équipes sont constituées. Je pense à Qonto qui a aujourd’hui douze personnes pas qu’en France, mais à l’international et c’est top.

Aujourd’hui très rare de faire ce travail dans ces conditions. En tout cas, je trouve que c’est un bon exemple à suivre. Après je n’y suis pas donc je ne sais pas si c’est bien fait ou pas, mais en tout cas je vois que ça bouge.

Dans les années à venir, j’espère qu’en France on arrêtera de n’avoir que des “équipes” d’UX writing d’une personne. Parce que ça ne tient pas.

Là, j’ai posé plein de règles, mais on est plein à faire plein de choses et je pense qu’il va falloir continuer à poser des règles, partager des choses, les Anglo-Saxons le font très bien.

Aussi partager des cas, du concret, sortir de la théorie. En fait, la théorie, on a toujours l’impression que c’est facile en vrai. Et je pense que vous avez dû voir avec vos projets que concrètement, ce n’est pas si simple et que c’est beaucoup de finesse, beaucoup de nuances parfois, etc.

En tout cas je suis contente de voir qu’il y a un engouement de dingue sur ce métier, qu’il y a de plus en plus de personnes qui ont envie de le faire, que les personnes cherchent des ressources, testent. Comme vous, quand vous avez proposé de faire votre webinar je me suis dis « Ah, c’est cool !« .

Je ne savais pas que vous alliez mentionner mon livre, mais juste le fait de faire des Rex (NDR : retour d’expérience), de partager vos expériences et que des personnes viennent voir ça, c’est important. C’est important de montrer ce qu’on fait et de montrer le process. Que ce n’est pas juste « je t’écris ou je te réécris tes mots« . Montrer qu’il y a un vrai process, que c’est utile.

Je pense que le futur du content design va être le conversationnel pur. Les assistants vocaux, les chatbots, toutes ces expériences qui passent par le contenu.

Plus largement, c’est ce que je disais tout à l’heure, le contenu, c’est pour moi le futur de l’expérience. Il y aura toujours du contenu et ce sera intéressant de voir aussi les profils qui vont plus aller vers du conversationnel pur, c’est-à-dire du chat bot, de l’assistant vocal. De plus en plus, on va vers ça et on a clairement toutes les armes. Après, il faudra aller se former parce que ce n’est pas le même métier. C’est-à-dire que oui, c’est tout le process design, mais on ne crée pas la même expérience, ce n’est pas la même manière d’écrire.

Je donne un exemple parce qu’on m’avait posé la question « est-ce qu’un UX writer ferait un bon conversation designer ? » j’avais dis oui et non. C’est-à-dire qu’on a toutes les compétences d’écriture, ça, c’est bien. Mais c’est comme comparer quelqu’un qui écrit des livres à un scénariste et à un auteur de théâtre.

Au théatre, il y en a beaucoup, beaucoup, beaucoup, beaucoup de mots, encore plus qu’au cinéma. Vous pouvez avoir des gens qui qui vont être très bons dans leur canal, mais qui ne vont pas pouvoir passer d’un canal à l’autre parce que ce ne sont pas les même manières d’écrire, tout simplement. Donc nous devons continuer à nous former.

Et le conversationnel, il y a beaucoup d’intelligence artificielle, donc il faut aussi qu’on se forme sur les aspects techniques. Mais je pense qu’il y en aura de plus en plus souvent, ces expériences vont exploser et donc nos métiers, nos forces – tant mieux ! – vont continuer à briller je pense.

Le conversationnel va apporter de nouveaux enjeux, de nouveaux usages qui sont encore inimaginables.

Le contenu est imparable, je pense que c’est de plus en plus évident pour tout le monde, en tout cas pour beaucoup de monde, mais le conversationnel, je pense que ça va être quelque chose de dingue. Avec des expériences qui n’ont rien à voir, de nouveaux enjeux, de nouveaux usecases qui sont inimaginables aujourd’hui.

Amélie : Super. C’est vrai qu’être dans la pratique tout de suite, ça donne du concret et ça permet de voir comment est ce qu’on peut se corriger. Et c’est vrai qu’à chaque fois, le contexte fait qu’on doit se réadapter en terme d’ateliers, etc.

Gladys : Et chaque écran est un contexte différent (rires).

Amélie : Oui voilà ! C’est vrai que c’est un vrai challenge dans nos métiers, ça donne envie de continuer d’explorer tout ça. Merci beaucoup Gladys !

Gladys : Ça fait plaisir en tout cas, merci pour l’invitation !

Amélie : On te remercie Gladys d’avoir accepté cette invitation autour de l’UX writing ! J’espère que nos auditeurs et auditrices ont pu en apprendre plus sur ce sujet qui n’a pas fini de nous surprendre. On espère également que ça vous donnera envie de soigner davantage vos contenus.

En tout cas, de notre côté, on en est convaincu et vous pourrez retrouver en ligne un exemple que tu as cité plusieurs fois Gladys qui est le webinaire que nous avons animé, « UX writiing, que fais-tu ? ». Un retour d’expérience sur un projet que nous avons mené autour des personnes qui sont en situation de deuil de leur conjoint, une forte problématique.

Merci beaucoup Gladys, au revoir.

Gladys : Merci, au revoir !

Justine : On se retrouve le mois prochain pour une nouvelle capsule design ! En attendant, n’oubliez pas que vous pouvez toujours vous abonner à la newsletter du podcast sur le site salutlesdesigners.lunaweb.fr pour retrouver l’ensemble des ressources de nos épisodes, les tips et conseils de nos invités.

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