SLD #34 · Maranaho N’Guessan, Designer expatrié

SLD #34 · Maranaho N’Guessan, Designer expatrié

Dans cet épisode de Salut les Designers, Alizée et Damien font le point avec un ami d’études sur son parcours après sa sortie de la MJM Graphic Design de Rennes. Il a continué de développer son expertise en design, mais pas que, loin de la Bretagne pour s’expatrier dans des pays anglophones. Une discussion passionnante et inspirante !

Publié le 09 septembre 2025

Bonjour à tous et à toutes et bienvenue dans ce nouvel épisode de Salut les Designers !

Pour ce premier épisode de la rentrée de septembre 2025, nous voulions proposer un épisode différent de d’habitude. Nous allons bel et bien parler de design mais nous allons aussi nous exporter hors de la France pour découvrir le parcours de Maranaho N’Guessan, designer expatrié. Il vit en Angleterre et a aussi vécu aux États-Unis.

Nous avions hâte de retracer les cheminements et choix qui l’ont fait atterrir loin de Rennes, là où Damien et Alizée l’ont rencontré en 2010, c’est-à-dire sur les bancs de l’école.

Bonne écoute à tous et à toutes !

[Introduction]

Maranaho N’Guessan : “On n’avait aucune crainte, ni peur. On a vraiment foncé. On n’était pas vraiment les plus organisés donc je peux vous donner plein de conseils à… Ce qu’il faut ne pas faire dans les pays anglo-saxons, enfin ceux que je connais en tout cas. » « L’Angleterre et les États-Unis, eux ils font l’inverse. Ils vont commencer par dire ce qui est bien et ce qui est pas bien, surtout en Angleterre, ils vont le dire mais vraiment ils vont mettre du sucre par dessus comme on dit là bas tu vois. [rires] » « Et en deux trois mois il y a quelques mots qui arrivent et il comprend ce qu’on dit et il parle. C’était impressionnant, en trois mois ! C’est-à-dire qu’à Noël il était bilingue alors qu’on est arrivé en septembre tu vois. »

[Fin de l’introduction]

Damien : Bonjour à toutes et à tous et bienvenue dans ce nouvel épisode de Salut les Designers, le podcast de l’Agence LunaWeb. Ici Damien et je suis accompagné aujourd’hui par Alizée, salut Alizée !

Alizée : Salut Damien !

Damien : C’est un épisode un peu spécial aujourd’hui car on a le plaisir de recevoir un ami de longue date Maranaho N’Guessan ou Naho et on va parler design comme d’habitude mais surtout on va aborder aujourd’hui l’expatriation, la vie et le travail de designer depuis un pays étranger.

Alizée : Du coup salut Naho, ça fait plaisir de t’avoir avec nous aujourd’hui. Comment tu vas ?

Maranaho N’Guessan : Ça va très bien, coucou Alizé, coucou Damien !

Alizée : Coucou !

Damien : Alors on te connaît depuis 2010 à peu près, on était sur les mêmes bancs d’école, en école d’art appliqué, la MJM Graphic Design de Rennes. C’est à l’époque où on faisait encore le design numérique, enfin en tout cas web, sous forme de Photoshop. Du coup le temps est passé depuis tout ça, est-ce que tu veux bien te présenter parce que tout le monde ne te connaîtra pas et puis nous partager ton parcours de designer depuis l’école justement ?

Maranaho N’Guessan : Je m’appelle Naho, aujourd’hui je suis ingénieur de design system.  Je l’ai jamais dit en français donc c’est très intéressant. Comme vous l’avez dit : formation de designer. J’ai fait beaucoup de code depuis 2010 là, depuis qu’on était à l’école.

Alizée : Du coup pour reboucler juste par rapport à ce parcours-là, effectivement on était à MJM Graphic Design donc on a une formation à la base de designer. Et toi après, comme tu l’as mentionné un petit peu là, t’as rebasculé côté développement. Est-ce que tu peux juste nous tirer un peu la ficelle de ce début de parcours justement dans le design ?

Maranaho N’Guessan : Ce qui s’est passé, comme vous vous rappelez, on était en alternance. On était en alternance tous, enfin tous les tous les chanceux étaient en alternance et c’était pas facile de trouver une alternance déjà tu vois. Donc ce qui s’est passé pour mon cas c’est que j’ai pas trouvé d’alternance jusqu’à la dernière, les deux dernières semaines. C’était genre en septembre tu vois. Je sais pas si vous vous rappelez : on a fait on a fait deux ans et la deuxième année si t’avais pas trouvé de l’alternance avant le début de l’année quoi genre octobre bah tu devais payer ton année en gros. Et j’ai postulé pendant des mois, j’ai rien trouvé. Et je voulais absolument rentrer dans une agence graphique à faire des super visuels, beaucoup de com’ et des choses comme ça. C’est ce qu’on voulait tous quoi mais j’ai pas trouvé. Moi j’ai trouvé ma place par un ami de ma femme, dans une boîte plutôt tech, plutôt de logiciel, tu vois, où ils ont dit “chez nous on a des designers, le seul truc c’est que les designers ils codent donc si ça te dit voilà quoi, nous on te prend en alternance”. Et c’est ce que j’ai fait.

Alizée : Donc t’as fait t’as touché un petit peu le design pendant la formation. Mais tu touchais aussi un petit peu le code. Et une fois que t’es sorti des études, avant de basculer dans le métier que tu fais aujourd’hui qui, ce serait bien que tu puisses nous le rappeler en tout cas, même en anglais… Qu’est ce que qu’est-ce que t’as pu faire ? T’es passé par quoi comme type de poste ?

Maranaho N’Guessan : Quand j’ai commencé, donc pendant l’alternance, je suis resté dans cette entreprise pendant trois ans il me semble. De 2011, c’est ça 2011, jusqu’à 2014, quelque chose comme ça, tu vois. Je suis resté pendant trois ans et j’ai adoré quoi. Donc, vraiment mon rôle c’était vraiment de faire le design, voilà comme on faisait à l’époque le web design. Comme il a dit Damien, Photoshop… Moi je faisais aussi un peu d’After Effects,  de motion design. Mais notre job, mon job à moi était trois designers c’était vraiment de designer avec les clients. Donc on était en relation avec eux tout le temps mais une fois qu’on a fini, on devait en gros faire la maquette quoi. Tu te rappelles quand on disait la maquette. À l’époque c’était HTML, CSS, jQuery, donc c’était même pas JavaScript. C’était vraiment jQuery juste pour faire bouger des boutons, voilà faire apparaître des menus mais tout était statique. C’était juste fichier clic droit, créer un fichier et faire un fichier HTML quoi. C’était vraiment ça, il n’y avait pas tout ce qu’il y a aujourd’hui quoi. Ça c’est un truc, ça m’intéresse beaucoup de parler de toute cette évolution incroyable, c’est vraiment dingue. Et donc voilà c’était ça mon premier job. Le truc qui s’est passé c’est que les feedbacks, vous vous connaissez ça par coeur les feedbacks, pas que le client mais même manager, collègue et tout sur le design… Tout ce qui touche un peu l’ego et le côté un peu créatif, j’avais vraiment du mal. J’avais vraiment du mal avec ça, j’étais vraiment frustré de la version 14, la version 16 d’un truc que j’avais commencé qui était génial, que moi j’adorais. Et quand on arrive à la version 14 au bout de deux semaines, tu détestes quoi. Et j’ai eu du mal avec ce processus-là et en parallèle de ça, j’adorais l’HTML CSS. Donc ce qui s’est passé pour faire court en gros, c’est que j’ai, au bout de trois ans comme je t’ai dit, j’ai quitté l’entreprise et je me suis mis à mon compte pendant deux ans, ou 2015 ou 2017, dans cette époque-là, à Nantes, quand j’étais à Nantes. Et quand j’étais à mon compte, c’est là où vraiment je suis parti, c’est mon propre train. J’ai créé mon propre délire parce que j’avais trop d’idées quoi, trop trop de choses dans ma tête et ça me suffisait plus le boulot donc c’est là où j’ai commencé à apprendre JavaScript. J’ai appris ça tout seul jusqu’au bout, jusqu’à ce que je sois décent on va dire. JavaScript, j’ai poussé le motion design, j’ai poussé la 3D. Je sais pas si vous vous rappelez d’un gars dans notre classe, il était à fond dans la 3D et c’est lui qui m’a introduit en gros à la 3D quoi. Donc voilà, tout ça pour dire que pendant ces années-là, j’ai vraiment poussé le côté 3D, JavaScript, design aussi mais comme je connaissais déjà je voulais explorer des choses un peu plus nouvelles donc voilà c’est ça en gros. C’est ça que j’ai fait.

Damien : Du coup Maranaho, en 2017 t’as fait un choix un peu particulier qui était celui de continuer ta route à l’étranger avec ta famille parce que t’étais déjà marié, tu avais déjà un enfant il me semble. Est-ce que tu veux bien nous parler de cette expérience, où est-ce que tu es allé et ce qui t’as donné envie de partir ?

Maranaho N’Guessan : J’ai depuis des années beaucoup beaucoup de questions sur le parcours et toutes ces questions-là justement. Donc je suis à peu près au courant de ce que les gens se demandent et ce qui intéresse tu vois. Moi j’ai déjà vécu à l’étranger même avant la MJM. J’ai vécu en Angleterre pendant un an quand j’avais 19 ans donc je connaissais déjà l’Angleterre très très bien. J’y ai vécu depuis que je suis tout petit,

je parle anglais depuis que je suis enfant quoi. Mais ce qui s’est passé en gros c’est que mon fils avait trois ans en 2017, parce qu’il est né en 2014 et ma fille était bébé, elle avait un an, même pas un an, elle était dans sa première année quoi. Et ma femme, ce qui s’est passé c’est qu’elle était… D’abord, elle avait très envie de vivre à Los Angeles en particulier, c’était Los Angeles et le fait que je dise par rapport à l’âge de mes enfants, c’est que c’est l’âge où il commence l’école. On voulait pas trop en gros que les enfants aillent à l’école en France pour des raisons vraiment autres : par rapport à notre vécu en tant que personnes, on va dire, d’un autre teint. Grandir à l’école en France c’était pas forcément notre préférence pour nos enfants donc c’était notre choix personnel. On a choisi de quitter la France, parce que les enfants commençaient l’école. Donc c’est un peu ça qui a motivé au début ce choix-là.

Alizée : Et du coup, est-ce qu’au moment de partir, vraiment, de franchir ce cap, de “allez c’est parti, on prend l’avion avec nos valises et tout ça”, est-ce que vous avez eu des doutes, est-ce que vous vous êtes posé des questions, un peu des craintes, des peurs ? Qu’est-ce qui finalement vous a décidé à partir et à franchir l’Atlantique dans un premier temps ?

Maranaho N’Guessan : Donc je peux vous donner plein de conseils à ce qu’il faut ne pas faire, ça je serais très fort là-dessus. On n’était pas super super organisés parce qu’on s’est vraiment décidés, tout ça à la dernière minute. Ça s’est décidé dans l’été et en plus on était propriétaires de notre maison, donc il y avait beaucoup, beaucoup de choses en jeu quoi. Et on s’est vraiment décidés, genre en juillet on a dit : “ok on part”.

Parce que je passais des entretiens à Nantes pour un job et je crois que je l’ai pas eu. Je ne sais plus exactement ce qui s’est passé avec cet entretien, mais le côté professionnel a beaucoup joué. Du coup, j’ai été recruté à Londres.

Ce que j’ai fait, c’est que j’ai mis mon CV, non pas mon CV, mon LinkedIn en anglais. Donc, j’ai tout traduit mon LinkedIn en anglais. Et ce que j’ai fait, c’est que quand tu changes la ville où tu vis, du coup, t’as les recruteurs de ce pays ou cet endroit qui t’appelle.

Donc, nous, on avait voulu aller à Los Angeles. On a essayé, ça n’a pas du tout marché. C’était vraiment très impossible. En Australie, on a essayé un petit peu. J’ai eu des pistes, ce qui n’a pas abouti. Mais dès que j’ai mis Londres, là, j’avais des recruteurs qui me contactaient depuis Nantes, enfin, moi j’étais à Nantes. Donc, c’est comme ça que j’ai eu mon premier job, en fait. C’est comme ça qu’on est partis en septembre.

Damien : Moi, forcément, un truc comme ça, je trouve ça super chouette, enfin, ce genre de moments de vie, de vivre une expérience à l’étranger. Mais il y a quand même ce côté un peu flippé que je peux avoir de me dire : mais en fait, administrativement, ça ne va pas être juste un enfer de changer de pays au niveau des papiers, de la sécurité sociale, des cotisations à la retraite, tout ça. Et même le déménagement, c’est-à-dire t’emmènes quoi ? T’emmènes toutes tes affaires ? Ou, au contraire, tu laisses en France ?

Alizée : Puis surtout, n’étant pas tout seul, et embarquant toute ta famille avec toi. Avec les enfants…

Maranaho N’Guessan : Les bébés, ouais.

Damien : C’est ça. Même au niveau des produits de soins pour les enfants, les trucs comme ça, est-ce que c’est un peu les mêmes en Angleterre ou est-ce que ça va être cata ?

Ça soulève tout un tas de questions. Tu dis que t’as foncé, mais en fait, au final, comment vous avez géré tous ces changements-là ?

Maranaho N’Guessan : Exactement comme ça. C’est-à-dire qu’on ne s’est pas posé toutes ces questions là du tout. On ne s’est vraiment pas posé les questions. On savait qu’on voulait y aller. Moi-même, je connaissais déjà bien l’Angleterre et j’y allais assez régulièrement. Donc culturellement, même si j’avais vécu quand j’étais jeune… Quand t’es jeune, ce n’est pas le même contexte que quand t’es adulte. Je travaille, tu vois. Donc ce n’est pas la même chose en termes de factures et tout ça. Je dépendais encore de ma mère à l’époque, j’avais 19 ans. Mais toutes ces questions-là que tu poses, on ne se les est pas posées.

On est juste partis et on a galéré sur place. Voilà, c’est ça qu’il s’est passé. Tout ce que tu as cité et d’autres. Et aux États-Unis, c’est la même chose. Mais c’est la même chose. Un exemple, je suis obligé de parler de ça parce que c’est tellement ludique. Lorsque tu arrives, la première chose dont t’as besoin, ça va être quoi ? À ton avis ?

Alizée :  Ton logement ?

Maranaho N’Guessan : Logement, ok. Numéro 2.

Damien : Un travail forcément, mais tu as disais que tu avais déjà trouvé quelque chose quoi.

Maranaho N’Guessan : Ouais, quand tu as déjà un travail, c’est sûr que c’est beaucoup plus pratique, c’est sûr. Mais tu n’es pas obligé d’avoir déjà un travail. Surtout à l’époque, avant le Brexit, tu arrivais à Londres avec ton sac dans la poche et c’est bon.

Alizée : Tes papiers quoi, surtout ?

Maranaho N’Guessan : T’as besoin d’un compte bancaire.

Damien, Alizée : Ouais, c’est vrai.

Maranaho N’Guessan : Alors, lorsque tu arrives, tu veux chercher un appart. Ils vont te dire, ok, est-ce que tu as un compte bancaire ? Parce qu’il faut un compte bancaire pour avoir l’appartement. Bah non, je n’en ai pas parce que je viens juste d’arriver hier, tu vois. Et là, je suis chez des amis. Ok. Bah, va ouvrir un compte et puis tu reviens nous voir. Donc, qu’est-ce que tu fais ? Tu vas à la banque. Tu dis “bonjour, je voudrais ouvrir un compte, s’il vous plaît”. Je suis français. Ils vont te dire, ok, très bien. T’as une adresse sur Londres ? Bah non…

Damien : C’est un cercle vicieux.

Maranaho N’Guessan : C’est réel, c’est pas une blague. T’as envie de dire “mais vous rigolez là” […]. Et c’est tous la même chose. Quand on arrive aux États-Unis… Juste, petite parenthèse en 2022, la même chose. La même chose. On a fait “mais c’est pas possible”. Donc j’ai des astuces pour ça, surtout aujourd’hui. C’est, quand on a ouvert un compte avec les banques en ligne, pas les banques en physique, donc Revolute, Monzo à l’époque, tous ces trucs comme ça, ça te débloque.

Alizée : Et justement pour rebondir là-dessus aussi, j’ai cru comprendre que tu étais chez des amis quand t’es arrivée sur Londres. Donc ça fait partie un petit peu de ces fameux points d’attache. Mais ma question c’était, justement est-ce que quand tu arrives à Londres ou quand t’es parti aux États-Unis, est-ce que t’avais déjà des connaissances sur place qui pouvaient t’accueillir ? Est-ce que, bon pour Londres t’avais déjà un job, mais est-ce que quand t’es parti aux Etats-Unis, t’avais déjà fait des recherches ? T’avais déjà aussi un job et un endroit sur lequel arriver ? Et puis du coup comment tu t’es créé un réseau en fait un peu sur place ? Parce que j’imagine qu’il faut se refaire aussi un peu connaître : bouche à oreille, même un réseau pour les amis, ta femme, tes enfants. Enfin voilà, est-ce que comment ça s’est passé cette partie-là ?

Maranaho N’Guessan : En Angleterre, en 2017 donc, je suis parti tout seul. Ma famille est restée à la maison, du coup à Nantes, et moi je suis parti tout seul. Et ma mission c’était de trouver un appart. Donc là je suis resté chez des amis pendant une semaine et en une semaine j’ai trouvé l’appart parfait au centre de Londres dans le budget nickel. Donc mission accomplie, mais c’est vrai que faut être chez des amis c’est beaucoup plus simple,

déjà c’est hyper cher d’être logé.

Alizée : Et puis t’as laissé ta petite famille en lieu sûr pour que toi tu puisses arpenter d’abord tout seul ?

Maranaho N’Guessan : Oui, déjà t’es chez les gens. Avec tes enfants. Et en plus tu vas devoir partir tôt le matin dans les transports que tu connais pas trop. Tu vois si tu peux partir tout seul, si c’est possible en tout cas, c’est sûr que c’est mieux. Donc pour Londres on avait pas un réseau mais on avait on connaissait quelques personnes, pas beaucoup. Pour les États-Unis, c’était un contexte complètement complètement différent. Je sais pas si tu veux qu’on aborde ce chapitre-là maintenant mais les États-Unis c’était un contexte complètement différent. Pour arriver jusque-là, je vais juste parler vite fait de mon parcours vite fait. En 2017, j’ai rejoint du coup une grosse boîte de tech qui s’appelle Intuit. Il y a pas vraiment d’équivalent en France mais c’est une grosse boîte de FinTech quoi et les quartiers mères ils sont au même endroit que Google, dans la Silicon Valley et Mountain View. À l’époque c’était genre 18 000 employés dans le monde entier dont à Londres. Et c’est là où moi j’ai commencé en 2017 en tant que contractant donc j’étais pas un employé, j’étais en contractant. Je suis resté dans cette entreprise du coup pendant 7 ans, jusqu’à là, récemment, l’année dernière. Moi, ce qui s’est passé c’est qu’en interne dans la grande boîte évidemment qui est basée en Californie, il y avait une offre. À l’époque j’étais design technologiste. Design technologiste c’était un rôle que j’avais, et c’est à voir avec l’innovation. Donc le but, pour faire simple, c’est des prototypes, mais des prototypes et de la présentation. Donc vraiment présenter des features du produit et de manière assez futuristique, j’ai envie de dire. C’est-à-dire que tu fais le design mais tu veux aussi faire le code et l’animation pour que ce soit vraiment de la présentation. C’est une innovation.

Donc c’était ça mon taf pendant au moins 3-4 ans. Et ce qui s’est passé, c’est qu’il y a eu un rôle qui s’est présenté à San Diego, dans ma boîte. Donc je faisais partie du même groupe Slack, si tu veux, la chaîne Slack de ma fonction design technologiste, elle était à travers toute l’entreprise. Donc on était un groupe de peut-être 15 design technologistes à Intuit dont je faisais partie. Mais j’étais le seul en Angleterre.

Ce qui s’est passé, du coup, c’est que j’ai eu ce job. Je l’ai eu ce job et il était ouvert, vacant, depuis 7 mois.

Alizée : Ah ouais…

Damien : D’accord..

Maranaho N’Guessan : Aux Etats-Unis. C’est-à-dire que pendant 7 mois, ils ont fait plusieurs entretiens et ils n’ont trouvé personne. Jusqu’au moment où moi j’arrive et moi j’ai eu le job.

Alizée : Quel messie !

Maranaho N’Guessan : C’est le genre de… En fait c’est juste pour montrer, c’est le genre de conditions, à l’époque en tout cas, c’est peut-être différent aujourd’hui, mais c’est le genre de conditions qu’il fallait remplir.

Il fallait non seulement qu’il y ait un poste qui soit ouvert, mais il faut qu’il soit vacant. Parce que tu peux pas prendre le travail d’un Américain en gros.

Si il y a personne pour le faire…

Alizée : Donc toi t’as eu cette chance là, parce que si le poste n’avait pas été ouvert ou quoi que ce soit, t’aurais pas pu avoir ce visa, pour travailler en tout cas.

Maranaho N’Guessan : Exactement. C’est ça. C’était le visa H1.

Damien : Tu viens pas remplacer quelqu’un. Tu viens parce que personne ne correspond.

Maranaho N’Guessan : Parce qu’il y a un manque. Et c’est pareil en Australie, je sais que c’est pareil en Nouvelle-Zélande et je crois que maintenant c’est pareil à Londres ou alors ça va le devenir, je sais pas. Tu vois ce que je veux dire ? Donc c’est un peu ce genre de conditions. C’est pour ça que c’est pas facile de partir travailler à l’étranger.

Alizée : Mais presque, il faudrait te faire aider quand tu veux travailler aux États-Unis. Il faudrait trouver quelqu’un là-bas qui comprenne un petit peu tes compétences pour essayer de te trouver le job qui aujourd’hui est manquant. Parce que toi qui veux partir aux États-Unis demain, tu trouves ce fameux job où en fait c’est hyper compliqué. Donc il faudrait presque avoir un contact avec des recruteurs là-bas ou autres pour effectivement essayer de savoir où est-ce qu’on peut te placer.

Damien : Il y a vraiment un système un peu de protection nationale de l’emploi en fait. C’est-à-dire nationale dans le sens où si t’as pas la nationalité, il va falloir faire quand même énormément plus d’efforts que n’importe qui.

Maranaho N’Guessan : Une autre piste, c’est ça, c’est la piste qu’un peu j’aimerais promouvoir aussi, c’est la mienne. C’est-à-dire que si tu rejoins un groupe qui est déjà basé aux États-Unis, parce que c’était en interne, c’était 40 fois, 1000 fois plus facile que si j’avais été tout seul, moi-même, avec ma famille, avec un avocat à essayer de…

Il y en a plein qui le font, mais c’est dur et ça coûte cher. Moi j’ai payé zéro, j’ai rien payé. Tout était payé.

 

Alizée : Mais il faut avoir la chance de pouvoir bosser dans un grand groupe au départ pour pouvoir vivre ce fameux rêve un peu américain quoi.

Maranaho N’Guessan : Ouais ça aide beaucoup. Moi en tout cas c’est comme ça que je suis parti.

Damien : On a pas mal parlé de toi, donc on a bien compris que tu avais réussi à trouver du boulot en amont pour à la fois l’Angleterre et à la fois à Los Angeles grâce à la promotion interne au sein d’Intuit. En ce qui concerne ta femme, Bintou, et aussi la scolarité des enfants, eux comment est-ce qu’ils se sont adaptés ? C’est une petite parenthèse que j’aimerais bien faire, parce que du coup c’est un projet qui n’incluait pas que toi, qui incluait d’autres personnes. Comment ça s’est passé pour le boulot ?

Alizée : Pour les écoles, les transitions oui effectivement ?

Maranaho N’Guessan : Par rapport à ma femme, depuis le début on a toujours fait le choix, en tout cas le souhait, que si possible moi j’allais bosser et que si possible elle allait rester à s’occuper des enfants. Ma femme elle est vraiment à fond sur l’éducation, c’est la grande priorité tu vois. D’où le choix de l’école au départ comme je disais. Elle, sa préférence, ce qui n’est pas la préférence de tout le monde, c’est de s’occuper vraiment des enfants quoi. Par rapport aux enfants, et ça je peux le garantir, j’en ai même vu des beaucoup plus âgés que les nôtres. Moi, mes enfants ils avaient un an et trois ans quand on est arrivés. Donc pour eux, ils n’ont même pas vu la différence. Mais même quand les enfants sont plus âgés, les enfants, je sais pas, vous savez sans doute mais ils ont un truc magique, c’est que comme ils sont encore en formation, ils n’ont pas cette notion de langue comme nous on perçoit les langues. Quand t’es enfant, et quand je dis enfant je veux dire même jusqu’à 17 ans, ça marche encore. T’absorbes mais carrément.

Mon fils à moi ça a pris peut-être trois mois pour être bilingue, alors qu’il parlait déjà quand il avait trois ans, en trois mois il était bilingue. Au début il chantait l’anglais, au début il faisait “lalalalala”, il chantait ce qu’il entendait. Enfin quand je dis il chantait, je veux dire il mettait le son, la musique de la langue.

Damien : Là où nous on voit une langue différente, eux ils voient juste une façon différente de dire des mots, des phrases, etc quoi.

Maranaho N’Guessan : Parce que ça va avec la culture. C’est l’école, tu vois, c’est les jeux à l’école, les blagues qu’on se raconte. Au début ils comprennent pas évidemment. Les premiers mois, les premiers jours, les premières semaines, c’est sûr, ils sont perdus. Mais ils ont cette capacité que nous on n’a plus parce qu’on a déjà absorbé l’information, j’en sais rien, les enfants c’est la culture. C’est pas que la langue. Ils apprennent pas la langue comme nous on apprend la langue à l’école. Ça n’a rien à voir : ils apprennent une culture.  L’accent, il vient pas après les mots, tu vois ce que je veux dire ? C’est une manière de faire, une blague, une manière de raconter quelque chose et c’est tellement situationnel c’est vraiment impressionnant. J’adore cet aspect-là, je pourrais en parler pendant des heures. Tu parles à ton fils ou à ta fille en français à la maison. Il y a ta cousine, ton grand-parent qui viennent à la maison. Vous parlez de Noël. Si tu demandes à l’enfant plus tard de parler de Noël, il va le dire en français. Mais si tu lui demandes de raconter ses devoirs ou ce qu’il a dû faire au foot ou quoi que ce soit, il va le dire en anglais. Et c’est contextualisé donc c’est pour ça que c’est pas vraiment des langues différentes. C’est juste là, je vous parle à vous, je vous parle d’une certaine manière mais si je parle à mon cousin je parlais d’une autre manière c’est la même même phénomène.

Alizée : J’imagine que, vu qu’au quotidien eux de leur côté c’est beaucoup l’anglais, est ce que vous à la maison vous vous, entre guillemets, forcez à parler en français pour qu’ils puissent avoir ce vraiment ce côté bilingue-là ou… Enfin quel est votre procédé là-dessus ?

Maranaho N’Guessan : C’est trop marrant. Ill y a les couples mélangés C’est-à-dire que, on va dire Jean, qui est français, il va à Londres tout seul et rencontre sa partenaire là-bas. Sa partenaire elle est russe ou elle est anglaise ou elle est japonaise, d’accord ? Donc ils ont pas la même langue entre eux mais ils habitent  en Angleterre. Donc entre eux ils vont se parler en anglais. J’en ai vu plein des comme ça à Londres : c’est que ça. Donc ils parlent entre eux en anglais, les enfants ils parleront pas la langue de l’un ou de l’autre à moins de faire un effort supplémentaire. J’ai des amis, le papa est canadien donc il parle américain et la maman elle est russe. Les enfants parlent russe parce qu’ils vont à l’école russe et qu’ils ont des cours de russe le samedi. Mais ça c’est rare. En général, quand les couples sont mélangés en termes de nationalité, les enfants ne parlent pas la langue des parents. Ils parlent que l’anglais c’est parce que les parents entre eux parlent anglais. Nous on leur parle qu’en français. Et l’anecdote marrante, c’est que des fois on parle en anglais avec eux mais c’est vraiment, encore une fois c’est situationnel, c’est pas vraiment un choix c’est plus que ça vient comme ça, c’est naturel. Tu dis des mots en anglais, des choses en anglais si les enfants te parlent en anglais, ce qu’ils font très souvent, encore une fois, pour des situations où des fois tu as envie de les gronder, tu les reprends tu vois . Du coup tu les grondes en anglais [rires] : tu bégayes, aucune autorité c’est limite ils font “quoi attends tu voulais dire ça, […] tu l’as pas bien dit,  tu veux que je te corrige ?”. […] C’est hilarant, t’as aucune autorité quand tu parles dans une langue étrangère parce que quand tu grondes, quand tu t’emportes, tu calcules pas autant tes mots donc c’est “non mais tu veux… tu vas aller… tu vas l’entendre…”. Tu as envie de le dire vite donc tu bégayes et ça, tu perds le côté autoritaire quoi. Donc c’est très marrant non il faut tu parles ta langue à tes enfants si possible comme ça les enfants si tu leur parles aujourd’hui ils parlent français. Même s’ils n’ont pas le même vocabulaire mais en termes d’accent c’est la même chose que nous.

Damien : Au final toi tu as pu aborder le design même des métiers dans le numérique un peu plus largement dans trois pays : la France, l’Angleterre, en tout cas Londres, et Los Angeles. Forcément nous ce qui nous intrigue c’est d’imaginer, de se figurer quelle est la différence justement de la façon d’aborder le design d’entre ces trois régions. Est-ce que tu as vu des différences ou est ce que, au contraire, il y a des similitudes ? Est-ce que tu penses qu’il y en a qui peuvent apporter à d’autres régions etc. ? En gros, qu’est-ce qu’on peut mixer d’intéressant là-dedans ?

Maranaho N’Guessan : La culture entre ces trois pays est différente. Elle est plus proche entre l’Angleterre et les États-Unis que la France mais elle est quand même différente entre l’Angleterre et les États-Unis. La plus grande différence est qu’on retrouve vraiment chez la plupart des Américains, même quasiment tous, on parlait du feedback au début : ça n’a rien à voir. C’est l’opposé et si on retrouve ça aussi dans l’éducation à l’école des enfants. Et je vais être en mode anecdote, hein forcément, mais quand j’étais à la fac à Rennes donc avant la MJM, j’étais à Rennes 2 à la fac. Je travaillais à Subway de Kennedy, de Villejean. Pour ceux qui connaissent, je travaillais là-bas pendant deux ans et mon boss, mon employeur quoi, il était très dur avec nous. Et il nous cassait quoi, il disait que des choses “ouais ça c’est pas bien, ça c’est non”… C’était vraiment dur et un jour on lui a demandé, on s’est un peu mis ensemble, on lui a demandé “mais pourquoi tu es aussi dur ? Pourquoi tu nous dis les choses à chaque fois, on dirait qu’on fait rien de bien”. Et qu’est-ce qu’il nous a répondu ? Il nous a dit “non mais c’est pas que vous faites rien de bien, c’est que quand c’est bien j’ai pas besoin de le dire parce que tu fais déjà bien donc j’ai pas besoin de le répéter vu que ça marche. Mais ce qui est pas bien, il faut que je le corrige pour que ce soit bien”. Donc c’est une boucle comme ça. Du coup, toi t’as l’impression que tout ce que tu fais c’est naze, tu vois c’est c’est nul. Alors que dans les pays anglo-saxons, enfin ceux que je connais, en tout cas l’Angleterre et les États-Unis, ils font l’inverse.

Ils vont commencer par dire ce qui est bien et ce qui est pas bien, surtout en Angleterre, ils vont le dire mais vraiment ils vont mettre du sucre par-dessus, comme on dit là bas.

[rires] Tu vois ? Ils parlent et les Américains, eux, ils sont à fond dans le “it’s amazing”. On croit que c’est une blague mais je t’assure qu’ils sont tous comme ça pour un tout et un rien. N’importe quoi : “i love your shirt, oh it’s amazing, où est-ce que tu l’as eu ?” et tout. Quand tu n’es pas habitué en tant que Français, maintenant je suis habitué donc je sais comment naviguer ça, mais au début ça te fait bizarre. Tu te dis “euh bonjour enfin ça va c’est juste pas grand chose” mais oui je sais pas, c’est culturel je ne sais pas. Je saurais pas dire le pourquoi mais […] c’est pareil dans les feedbacks. Ils vont te dire “ce que tu as fait, la maquette, ton design : incroyables, j’adore”, ils vont te lister tout ce que tu as fait de bien. Ça veut pas dire que… Nous en tant que Français on se dire “bon bah dis donc j’ai vraiment j’ai vraiment…”

Alizée : “cartonné quoi” …

Maranaho N’Guessan : Quand tu es là-bas, tu comprends que c’est pas ce que ça veut dire. C’est juste culturel il dit ça parce qu’après il va te dire ce qu’il aimerait bien corriger donc après il va te dire le feedback mais ce sera pas comme on le dit en France en tout cas c’était mon expérience tu vois ça.

Damien : C’est intéressant : il y a un peu un ordre dans lequel dire les choses. C’est-à-dire qu’on va parler de ce qu’il faut améliorer mais avant on va dire ce qui est bien ça fait un peu le parallèle avec comment tu gères tes enfants. Quand tu rentres à la maison, il y a ce truc de bon bah alors maintenant – ma fille s’appelle Juliette-,  “Juliette tu vas faire tes devoirs”. Enfin, en gros tout de suite tu commences à la mettre en ordre de route alors qu’en fait ce qu’il faut faire c’est “ok comment s’est passée ta journée ? C’était bien ?” etc. Puis quand on a parlé, bon alors maintenant c’est bon on va se faire les devoirs ensemble et c’est vraiment une histoire d’ordre. Et ça me fait penser à ça, on met les trucs dans le désordre des fois et du coup on se braque, on se frustre entre nous alors qu’il faudrait juste des fois, ce serait presque une éducation à avoir comme tu dis, de questionner dans quel ordre on se partage et on se dit les choses quoi.

Maranaho N’Guessan : Exactement. Je sais pas si c’est mieux mais en tout cas c’est différent. C’est vraiment une différence quoi.

Alizée : Et du coup en quoi toutes ces expériences toi t’ont fait évoluer en tant que designer ? On va dire, c’est quoi ton plus gros challenge ? Le plus gros challenge que tu aies eu à relever dans ta vie quotidienne, au boulot ou autre, à l’étranger ? On va dire celui qui t’a marqué, celui qui a été ce dont tu as été le plus fier ?

Maranaho N’Guessan : Je peux parler du plus gros challenge : c’est le layoff. J’avoue j’ai pas recherché comment on dit ça en français… C’est le licenciement économique, quand tu te fais licencier mais que t’as rien fait de mal tu vois, c’est juste on t’a choisi pour raisons x y. La raison pour laquelle je suis rentré en Angleterre c’est parce que j’ai perdu mon travail à Intuit tu vois. J’ai perdu mon travail en septembre officiellement et me l’ont annoncé en juillet quand j’étais en France en vacances chez ma mère. Donc ça, sachant qu’on était aussi propriétaires d’une maison en Californie…

Alizée : Ah ouais propriétaires en Californie en plus…

Maranaho N’Guessan : Ça c’était le plus gros challenge de loin professionnel et personnel parce que remise en question sur plein plein de choses. Pourquoi est-ce qu’ils m’ont choisi moi parmi 1800 employés ? Parce que, je vais dire, 18000 employés au total ils ont licencié 10% donc on est 1800 à avoir quitté Intuit le même jour, moi inclus. Donc je me suis posé la question et j’ai remis tout mon parcours depuis la MJM en questio. Je me suis demandé “ok design + code + motion : c’est trop brouillon ça”. C’est vraiment des choix de carrière. Je me suis dit qu’ils arrivaient pas à me mettre dans une équipe parce que je venais de l’innovation. Mais pour moi c’était temporaire : à la base je faisais du design et du front-end. Là j’ai trouvé un job qui était cool, qui m’intéressait.

J’ai eu du mal à Intuit, à la fin en tout cas, à trouver ma place au final. Parce que les designers ont dit “ah mais c’est un ingénieur dans notre équipe”, les ingénieurs ils disaient “ah c’est un designer dans notre équipe” tu vois un peu ?

Donc c’est pour ça qu’à la fin, le jour où il y a eu les layoffs à Intuit en 2024, là ils m’ont dedans : parce qu’ils n’arrivaient pas à trouver une place pour moi. Mais ils m’ont pas prévenu. Mais voilà, donc ça c’était le plus gros challenge parce que on avait déjà fait la relocation une fois de France à Londres, une deuxième fois de Londres à Los Angeles et là de manière imprévue avec le bébé qui venait de naître il y a pas longtemps, on a dû refaire un autre relocation. Mais cette fois-ci, c’était pas notre volonté et c’était pas un timing qui nous intéressait. On a parlé du réseau : on avait tout un réseau à Los Angeles, beaucoup d’amis, beaucoup d’activités. On avait notre maison, on avait un chien… Du jour au lendemain ils disent “tu as 60 jours pour quitter le pays parce que ton visa il est fini maintenant”.

Damien :  Je retourne un peu sur le côté pro. Nous, on a des sujets un peu marottes. Un truc important pour nous côté Luna, c’est l’accessibilité web. Je sais pas si tu connais, en France on a notamment un référentiel qui sert un peu de guide et qui s’appelle le RGAA (Référentiel Général d’Amélioration de l’Accessibilité). Comment c’est traité, a priori, aux États-Unis et en Angleterre de mon point de vue, c’est traité. Il y a qu’à voir comment Apple, par exemple, l’intègre sur les iPhone etc. Mais, est-ce que toi tu as été confronté à ça dans tes missions ? À faire de l’inclusion notamment liée au handicap ?

Maranaho N’Guessan : C’est une super question. J’adore. C’est vraiment le cœur de mon métier. On vient tous de la même formation donc c’est quelque chose […] que je veux faire tu vois. Depuis 2022, mon rôle c’est de travailler dans le design system. Je suis dans le design system depuis ce moment-là et je suis vraiment à fond dedans. J’adore ça, j’adore les composants. Et le design system ne peut pas ignorer l’accessibilité tu vois. C’est vraiment dans le cœur du métier. On est vraiment les personnes qui construisent l’interface avec laquelle l’utilisateur interagit directement, tu vois vraiment les boutons, tout ce qu’on fait depuis toujours.

Alizée : Oui, tout à fait.

Maranaho N’Guessan : Je suis moins impliqué dans le côté stratégique du product designer, qui va plus répondre à la question de “qu’est-ce qu’on résout comme problème ?” et tout ça. Moi je suis plus impliqué sur la question de l’accessibilité, sur la question de l’expérience utilisateur et de l’inclusivité. Donc, est-ce que c’est quelque chose qui est traité ? Oui à 100% surtout quand tu as un design system et une équipe qui s’occupe de ça.

Damien : Dans la même veine, l’autre sujet qui nous anime pas mal en ce moment, enfin depuis quelques années, c’est la sobriété numérique, l’éco-conception. En France, ça bouge pas mal. Je crois comprendre qu’on est plutôt assez moteurs, en Europe en tout cas, sur le sujet. Parce qu’on a un référentiel aussi qui est sorti, qui s’appelle le RGESN depuis 2022 et dont on a espoir, a priori politiquement, de le faire un petit peu voyager dans les autres pays d’Europe. Est-ce que vous abordez ces sujets-là ? Est-ce que vous avez déjà une conscience du fait que le numérique ait un impact sur l’environnement et qu’il existe aussi des solutions pour minimiser son impact sur l’environnement ? Et si oui, bah qu’est-ce que vous mettez en pratique quoi ?

Maranaho N’Guessan : Ben tu vois, cette question-là, je la connais uniquement en préparant des entretiens. J’ai préparé des entretiens pour différentes boîtes, les dernières. Et il y avait le challenge white board : c’est le niveau élevé on va dire. On n’est pas dans les détails. Ils avaient cette question-là justement : quel est l’impact de ton design justement sur la société de manière générale ? Sur, par exemple, des questions comme l’addiction, ou…

Damien : Ah oui, genre les dark patterns ?

Maranaho N’Guessan : Bah, même pas forcément les dark patterns. Par exemple, je ne sais pas, je vais te donner un exemple facile. Si t’es designer chez Meta et que tu participes ou contribues à Instagram tu vois, quel genre de stratégie tu vas mettre en place pour que les gens soient le plus possible sur Instagram ? Et quelles conséquences ça a ça sur la société de manière générale, ou Tiktok ou des choses comme ça tu vois. Quelle est ta part à toi, en tant que designer ?

Quelle est ta part de responsabilité dans les choses dont on se plaint un peu aujourd’hui. On est tous sur nos téléphones : est-ce que c’est pas justement à cause des designers ? On rend ça addictif.

Alizée : Bien sûr.

Maranaho N’Guessan : C’est ces questions-là qu’on se posait… Enfin qu’on se posait… Pendant que je préparais mon entretien. Au travail de tous les jours c’est vrai que j’ai pas eu à me poser ces questions-là jusqu’ici.

Damien : Bah c’est super intéressant, merci vraiment beaucoup Naho d’avoir passé ce temps ensemble. J’ai trouvé ça vraiment intéressant. C’est un podcast qui m’a fait plaisir. Et donc prendre ce temps-là pour parler de toutes ces années passées depuis qu’on t’a vu. Parce que finalement là on s’est raconté plein de choses, finalement on se connaît bien mais on s’est pas trop donné de nouvelles ces dernières années donc c’est aussi l’occasion de le faire. Et le côté inspirationnel pour toutes les personnes qui te connaissent pas mais peuvent avoir des envies d’expatriation. Parce que c’est une sorte de doux rêve pour pas mal de gens et c’est pas mal de gratter un peu derrière pour voir de quoi il en retourne. C’est vraiment chouette de nous avoir partagé ça Naho.

Alizée : Merci beaucoup !

Maranaho N’Guessan : Avec plaisir, c’était ma première fois de faire un podcast et c’était top. Merci.

Damien : Tu t’en es bien sorti ! Merci !

Alizée : Eh bien encore une fois, il ne nous reste plus qu’à vous remercier d’être toujours plus nombreux à suivre notre podcast. Nous espérons que ce nouvel épisode vous aura plu. On se retrouve très vite pour un nouvel épisode de Salut les Designers, mais en attendant, n’hésitez à écouter ou réécouter les épisodes précédents et à vous abonner à la newsletter du podcast pour retrouver l’ensemble des ressources de nos épisodes, les tips et les conseils de nos invités. C’est sur le site salutlesdesigners.lunaweb.fr que ça se passe. On vous invite aussi chaleureusement à commenter cet épisode et les autres sur Apple Podcast et Spotify et leur mettre 5 étoiles s’ils vous ont plu. Ça aide vraiment le podcast à être diffusé au plus grand nombre alors merci. Sur ce, on vous dit à très bientôt pour de nouveaux épisodes de Salut les Designers.

[musique de conclusion du podcast]