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Déjà 5 ? Déjà 5 ! Édition après édition, les rencontres UX Deiz s'enchainent et s'étoffent aux côtés d'une communauté toujours aussi réactive. Dernier épisode en date, une soirée entière dédiée au jeu et à la gamification : un sujet dense et passionnant dont nous avons profité avec attention, ne boudant pas notre plaisir à découvrir les nombreux ponts entre nos métiers et ceux d'un game designer ou d'un level designer.

Du morpion à Zelda en passant par le Monopoly, pas de jeu sans UX !

L’homme et le jeu, une grande histoire de love

Pour Florentin, premier orateur de la soirée, toute cette histoire de gamification a commencé dans un caddie de supermarché avec une boîte de cordon bleu. À cette lointaine époque (désolé Florentin), une marque avait réussi à trouver comment faire qu'un charmant gamin (on se rattrape comme on peut) réclame toujours plus de cordons bleus à ses parents pour récupérer... les aimants « départements » contenus dans chaque boîte. Et ça marchait ! Un exemple de gamification qui restera longtemps dans les esprits. Comme Foursquare... ou peut-être plus que Foursquare.

L'application était il y a quelques années une très belle réussite de gamification en version numérique mais n'a pas su transformer l'essai. Est-ce que ce succès a marqué durablement les esprits ? La réponse dans 20 ans mais quand on sait que les albums Panini sont toujours de la partie, la tâche va être rude.

À la découverte du Flow

Le jeu ne sert pas uniquement à divertir ou à faire manger des cordons bleus aux enfants. Le jeu peut être sérieux : on parle alors de « serious game », un dispositif qui utilise des éléments du game design pour proposer un produit ludique, dédié à la formation, à l'apprentissage, au team building, au recrutement... Tous les sujets se prêtent au jeu comme au jeu sérieux !

Le jeu sérieux a pris une nouvelle dimension avec le numérique qui a aussi vu naître un être d'un nouveau genre, une sorte de dopplegänger en data. À l’ère du quantified self, nous pouvons très simplement nous mesurer aux autres et à nous mêmes. Savoir si on dort mieux le jeudi après une séance de cross fit et un diner à 588 calories, ou le dimanche soir après un apéritif et un épisode de House of Cards. Savoir si un de nos collègues a fait 3’30 de moins sur le même parcours de running que nous (il avait triché, il sortait juste d'une cure d’infusion de graines de chia).

Mais au-delà de ces mesures, ce qui fait notre plaisir à participer à un jeu, sérieux ou non, c’est sa capacité à nous amener au Flow, une théorie de l’expérience optimale élaborée par un psychologue hongrois, Mihály Csíkszentmihályi (pas le flow de votre MC préféré donc).

Très rapidement résumée, cette théorie dit que nous passons les meilleurs moments de notre vie quand nous sommes penchés sur une tâche utile (sortir les poubelles) porteuse d’une dose parfaite de challenge (sortir les poubelles en descendant 17 étages à cloche pied). Comprendre cette équation parfaite, c’est réussir une gamification qui va engager et fidéliser l’utilisateur.

 

Les tests utilisateurs dans le jeu

Les jeux ont subi l’épreuve des tests utilisateurs bien avant nos dispositifs web et autres applications ! Autour de la table ronde de cet UX Deiz #5, Karine Sabatier, Fibre Tigre et Oscar Barda étaient unanimes : gérer les tests utilisateurs, c’est un apprentissage. Aujourd’hui, les prescripteurs ne sont plus les journalistes ou les youtubeurs mais les… streamers.

« Heu, un journaliste je vois le job, un YouTubeur à peu près mais… c’est quoi un streamer ? » Les non-initiés aux jeux vidéos seront peut être hermétiques au concept mais ce sont des personnes à priori normales qui filment et diffusent leurs sessions de jeux vidéos… On a donc des streamers qui testent, on peut commander des ghost reviews aux journalistes, on peut diffuser un jeu à 20% et le corriger suite aux retours.

Mais nous pouvons améliorer un dispositif seulement si nous comprenons ce qui a généré un sentiment négatif. Avoir des retours c’est bien, savoir les interpréter, c’est essentiel... mais pas toujours aisé sans formation et sans expérience. Comme le dit Fibre Tigre, « on est quasiment dans une forme de langage non parlé ». Un langage qu'il faut savoir décrypter.

Pas de jeu sans UX

Comment atteindre le graal de l’UX en créant un jeu ? C’est Oscar Barda qui se lance dans une réponse : « en générant des états qui sont satisfaisants sur la durée et légèrement frustrants sur la fin ». Un retour au Flow évoqué précédemment ? Pour créer ce contexte parfait, on sait déjà qu'on peut s'aider des retours des utilisateurs, de la data, mais aussi… de l’IA. Sur le sujet, les intervenants nous ont rappelé qu’on se trouvait actuellement à une époque charnière. Aujourd'hui, l'IA joue un rôle dans les jeux vidéos de deux façons :

  • avec la méthode combinatoire qui assemblent des items pour créer des phrases, un dialogue, une histoire
  • avec les réseaux neuronaux : l'IA génère alors du texte à la volée, elle est "entrainée" et capable de s’adapter au fil du jeu

Le bémol ? Le jeu vidéo est devenu une expérience collective, les mondes de jeux sont des open words qui se construisent de manière itérative… Les joueurs créent eux-mêmes leurs propres expériences ! C’est ce que dit Frank Lantz :

chacun devient le game designer de l’autre

Et pour demain ? Il reste beaucoup à faire, notamment pour créer des jeux vidéos exigeants intellectuellement et à la hauteur de leurs joueurs. Karine Sabatier et Fibre Tigre ont notamment cité Civilisation ou Monument Valley… Du côté du graphisme aussi, le champ des possibles reste presque totalement inexploré si on le compare avec tous les courants artistiques que l’homme a déjà expérimentés. Fibre Tigre suggère:

et pourquoi pas un jeu vidéo en aquarelle ?

Dans tous les cas, et vous n’en doutiez probablement pas, l’avenir du jeu promet d’être passionnant. Et pas seulement grâce à la technologie !

Une dernière piste de réflexion de cette soirée vraiment enrichissante ? C’est Karine Sabatier qui nous rappelle la conclusion des tests utilisateurs de Netflix : « les gentils convertissent moins bien que les méchants ». Alors, au travail les gentils. On mise sur une conclusion différente pour l'UX Deiz #124 ?